La Descente au fil des jours
Courageux, levés vers 3 heures du matin pour partir de Gletsch, les jeunes de l’Institut St Raphaël de Sion (Suisse) ont le sourire, face à la descente des derniers lacets de la Furka.
Température 3°, brouillard et vent d'enfer à 6H00 du matin, les moufles ne sont pas de trop, le sourire non plus.
Les cantonniers, malgré la route fermée, avaient accepté qu'on se fraye le passage entre des murs de neige et de glace impressionnants. Ils n’avaient jamais vu pareille tentative sitôt dans la saison.
Les kilomètres défilent dans le silence…on retient son souffle, on masque sa peur, la mer est encore loin. Du torrent qui naît, Brigue, Viège, Sierre en font un fleuve; l'eau partout prête à bondir hors de son lit nous confirme que c'est bientôt l'été.
Face au vent, que c'est loin Martigny. Debout sur ses pédales, Alan n'en croit pas ses efforts. Malgré toute sa volonté, pas plus que les autres il n’avance. Rencontre surprise avec ALIOUI grand footballeur du FC SION admiratif : contact immédiat, les jeunes ont apprécié…
Le 2ème jour, la bise de St Maurice dans le dos remet les compteurs vers le haut...Lausanne est vite là, puis Genève, une balade pour rire..., on comprend beaucoup mieux comment les coureurs du Giro y trouvent du plaisir, « Trop facile M'Sieu s’enhardit Valentin ». Genève, l’ONU Palais Wilson, Jean Zermatten grande personnalité de la Justice accueille, à l’occasion des 20 ans de la création des Droits de l’enfant, avec ces mots qui parlent au cœur, les jeunes fatigués mais comblés.
Trop fière, Erdita tend le t-shirt et ses joues à Jean Zermatten qui s'empresse, par dessus cravate et veston, de le revêtir en lui faisant 2 grosses bises avant de nous souhaiter « Bon vent » et de nous inviter en novembre, à l'occasion de la grande fête des Droits de l'Enfant !
Lorsque le 3ème jour, tu mets le postérieur sur la selle, tu gamberges. Le sourire trop vite esquissé masque mal tes douleurs…Et là tu fais nettement moins le fier, le nez dans le guidon, tu poses les questions qu’on ne pose jamais en de telles circonstances : « c’est encore loin ? » Abibe nage dans ses pensées : jamais je n’y arriverai ! Le château de Moulinsart est laissé sur le bord de la route de Frangy Haute Savoie avant d’arriver à Seyssel : son superbe pont, sa vielle ville, le fleuve, qui s’est mué en un géant de plus de 100 m de large…Que d’eau le Rhône ! On s’arrête bougonne Sébastien ! Chanas a trop d’attraits, son canal qui relie le Lac du Bourget au Rhône, irrésistible… « Oui on s’arrête et là c’est le ouf général, les jeunes se muent en forts à bras…et on se fait une escapade fluviale en canoë entre le petit et le grand lac par le célèbre chenal. Elodie revêt pour la première fois un gilet de sauvetage. « Je suis mieux sur le Rhône qu’à côté de lui s’esclaffe Benjamin » Belley et son ancien monastère nous attend pour une nuit…tranquille ?
Dimanche, départ aux aurores pour la 4ème étape de 137km. Nous observons avec respect en bord de route les nombreuses plaques témoignant des persécutions de la dernière guerre mondiale. C’est Pentecôte, il fait beau, les routes sont calmes, les sous-bois fument des barbecues en famille . L’appétit ne vient pas en mangeant, il est là au fond de l’estomac. Miguel se manifeste : « trop faim mec pourquoi on s’arrête pas ? Loyettes et sa superbe et bucolique rive est trop accueillante. On fait la pause… « Hé M’sieu c’est trop ici…on reste ?» Pas de réponse…si ce n’est ce courage qui fait l’adulte : « Départ dans un quart d’heure » Même les deux motards Bernard et Dominique se prennent à regretter d’être venus. Je passe mon temps à réparer les bécanes ! pas le temps d’avaler mon sandwich ! La Maison du fleuve à Givors nous attend… superbe avec notamment l’exposition du glacier en hiver. En effet rares sont ceux qui l’ont vu en pareille saison. Les routes du col ne s’ouvrent que tard en juin, on entend « c’est beau, c’est dingue.. » mais la fatigue est partout…on valse de fatigue…tous sans exception.
Lundi de Pentecôte : on n’a que 85 km à faire aujourd’hui, Vienne à Valence …d’ Autriche en Espagne s’essaye un petit futé. Les fraises, les bigarreaux, les premiers abricots du Roussillon, c’est magique…et le sucre remet de l’ambiance.. Vivement Montélimar plus bas…
Mardi… beau temps comme d’hab, et le mistral s’est levé. « Chouette, on va plus vite « 30,4 km/h de moyenne » que ceux de la vraie descente du Rhône de l’ARVI qui l’ont fait à vélo de course en septembre 2008 mais face au vent de mer… Le genevois de service, Jean-Jacques, accompagnant émérite roule comme aux belles années de sa carrière cycliste..
Des noms qui respirent lavande, thym et garrigue, les gorges de l'Ardèche, la Drôme provençale..mais qui respirent aussi le fauve lacustre : *La Ferme aux Crocodiles * où la halte est de rigueur, un peu de fraîcheur humide et c’est la suite du périple vent dans le dos..Elodie ! j'entends sa petite voix chantante dans mon dos : « eh M'sieu, vous avez vu ? j'arrive à vous suivre…j'ai plus mal aux jambes et aux fesses… Génial..j'adore le vélo » Rien que pour entendre ça , rien que pour ces petits plaisirs discrets qui chantent agréablement à l'oreille, rien que pour cela…ça vaut la peine de se donner tant de mal pour relier la mer avec des jeunes...
Et puis c'est Villeneuve les Avignon, un superbe endroit qui nous fait découvrir le si majestueux Palais des Papes d'Avignon, le Mont Ventoux et le Rhône souverain des lieux. Un dernier effort et il est à la mer...et nous aussi.
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Arrivée à La Grande Motte le 03 juin
Le Rhône une affaire qui coule de source !
Aujourd'hui 3 juin...derniers coups de pédales pour Sébastien, Benjamin, Bryan et les autres aussi, pour nos petites reines les filles de l’équipe, plus féminines à vélo qu’elles ne le montrent en d’autres lieux, et cette rage surtout qui les fait avancer : « On va leur montrer aux mecs qu’on en a gardé sous la pédale...La mer on va la voir...et on l'aura »
ça chantonne dans le peloton.. La MER…enfin ! 3 jeunes du groupe ne l’ont encore jamais vue en vrai ! Elle est là ! le fleuve nous tend ses derniers bras et s’écoule dans l’immensité…la Camargue elle aussi bien réelle, sauvage et naturelle, n’est pas un mirage.
Des voitures sur le bord de la route, des petits signes à Aigues-Mortes déjà, un drapeau dans une voiture qui nous précède nous prouvent que nous sommes attendus. Monsieur René Cattin Président de l’ Association du Grand Travers nous accueille avec beaucoup de chaleur dans le cadre d’une démarche de sensibilisation au déplacement éco mobile. Nous avions accepté son invitation pour montrer que la mobilité douce doit s’inscrire encore mieux dans les aménagements urbains et touristiques !
Il nous dira aussi que le Rhône, fleuve mythique, a apporté le sable des magnifiques plages locales, et l’eau qui coule dans les robinets des grandmottois.
Le Maire nous reçoit à l’Hôtel de ville et nous apprendra que c’est le Général de Gaule qui a décidé la création de La Grande Motte, station balnéaire devenue une ville avec 8.000 habitants permanents et près de 100.000 en saison. Et qu’un projet de rénovation urbanistique prévoit de faire une large place aux déplacements en vélo.
Nous apprenons aussi que nous précédons de quelques jours les coureurs du Tour de France qui feront étape ici 40 ans après un 1er passage dans la cité en construction.
Et devinez dans quel hôtel nous passerons 2 nuits ? Vous aimez les jeux de mots ?… nous logerons aux Cyclades… la boucle est bouclée …
Texte JL Virgilio Responsable de l’Institut Saint Pierre Photos : JP Besnier
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